Alors que le salon de Francfort doit ouvrir ses portes demain, on a appris vendredi par Le Monde que la Direction de la répression des fraudes portait de lourdes accusations contre le groupe PSA. Elle évoque une "stratégie globale visant à fabriquer des moteurs frauduleux, puis à les commercialiser". Le constructeur français a vivement réagi, en soulignant d'abord ne pas avoir été contacté par la justice, ni avoir eu accès au dossier transmis au parquet. Le groupe PSA a par ailleurs réaffirmé qu'il n'avait jamais équipé ses véhicules de logiciels capables de détecter un test de conformité et d’activer un dispositif de traitement des polluants qui serait ensuite inactif sur la route.
Le timing n'est probablement pas innocent. Mais, la question est de savoir à qui profite ce climat de suspicion.
Dans un article clair, un confrère de Challenges explique que ce prétendu scandale
tient à deux facteurs : d'une part, une différence d'appréciation entre des fonctionnaires administratifs (Bercy) et des techniciens de la Commission Royal, qui ont mieux compris les subtilités de la stratégie moteur de PSA ; et d'autre part, une législation assez floue qui peut donner matière à interprétation. Quoi qu'il en soit, il y a quelqu'un qui veut jouer à Zorro et qui veut la peau du Diesel.
Ce que je trouve détestable, c'est que cette affaire mine les efforts sincères entrepris par des constructeurs pour faire oublier le Dieselgate. PSA se retrouve dans la peau d'un Volkswagen, alors qu'il a décidé d'anticiper de trois ans le seuil qui sera exigé en 2020 pour le RDE (mesure des émissions réelles). Ce même acteur qui a engagé une rare démarche de totale transparence sur les consommations et émissions de CO2 de ses modèles en usage réel qui sera étendue aux émissions de NOx d’ici la fin 2017.
En Allemagne, le contexte n'est pas meilleur pour le Diesel. Les accusations de cartel et les rappels massifs des constructeurs allemands* pour des mises à jour vont sans doute faire des dégâts dans l'opinion. De plus, l'Europe s'en mêle. Les autorités de protection des consommateurs et la Commission européenne demandent instamment à Volkswagen de terminer les réparations de tous les véhicules touchés par le scandale des émissions. VW s'était engagé à réparer tous les véhicules concernés pour l'automne 2017. Aujourd'hui, les autorités de protection des consommateurs de l'UE, sous la houlette de l'autorité néerlandaise pour les consommateurs et les marchés, demandent instamment au constructeur de confirmer d'ici un mois que ce calendrier sera respecté. Elles exigent une transparence totale en la matière, y compris un compte rendu détaillé de ce qui a été réalisé et de ce qui reste à faire.
La veille de l'ouverture du salon, le Président de la VDA (chambre syndicale allemande de l'automobile) a pris la parole pour dire que le salon se déroule dans un climat inhabituel, en raison de la politique. Il réclame un débat plus objectif, tout en rappelant que le Diesel moderne est incontournable pour atteindre les objectifs de CO2. Un Diesel qui va devenir plus propre, en raison des nouvelles normes. La VDA réfute l'idée que l'industrie automobile allemande reste tournée vers le passé, au lieu de se tourner vers le futur.
Ce sera intéressant de voir comment le Diesel sera (ou pas**) mis en évidence à Francfort. L'accent sera sans doute plutôt mis sur l'électrique, histoire de "verdir" le discours. Mais, qui ment le plus ? Le constructeur qui dit qu'il ne triche pas sur ses moteurs ? Ou celui qui va dans le sens du vent et annonce des ambitions irréalistes dans le zéro émission ?
*Sauf BMW qui ne l'a pas jugé nécessaire.
**Les pubs visibles dans Francfort sont plutôt axées sur l'électrique, comme celle de Mercedes sur son label EQ.