Suite à une plainte des maires de Paris, Bruxelles et Madrid, qui ont contesté le "permis de polluer" accordé par la Commission européenne aux constructeurs automobiles*, le Tribunal de l’Union européenne a décidé d'annuler une partie du règlement européen sur les émissions d’oxydes d’azote (NOx) des véhicules, avec un nouveau texte à préparer d'ici 12 mois. C'est une première qui souligne le poids que prennent les villes par rapport à l'évolution de la législation. Anne Hidalgo parle évidemment d'une "victoire historique des villes face à la Commission européenne". Reste à voir comment vont réagir la Commission et l'industrie automobile, dont l'ingénierie est très perturbée depuis la mise en place du nouveau cycle d'homologation WLTP et les essais sur route RDE.
Les constructeurs automobiles attendent d'examiner en détail l'arrêt rendu par la Cour de justice des Communautés européennes. Un pourvoi est évidemment possible. Et cela décalerait l'obligation qui serait faite d'appliquer encore plus tôt des seuls d'émissions plus sévères. Il y a un mois, l'ACEA rapportait - en se basant sur les rapports des organismes en charge de l'homologation - que la plupart des modèles Diesel respectaient déjà les seuils fixés pour 2020. Les 80 mg sont donc à la portée des meilleurs élèves.
Du coup, la "victoire historique" reste à relativiser.
Le fait est que certaines marques seront plus en difficulté et que cela va être à nouveau la panique dans les ingénieries, qui ont déjà fort à faire pour mener de front les sorties de modèles thermiques et une stratégie d'électrification.
Comme toujours, en matière de pollution de l'air, on est vite dans l'irrationnel. Et les politiques qui mènent un combat électoraliste au nom de la qualité de l'air (comme si tout était dû à la voiture) devraient davantage penser aux conséquences (voitures toujours plus chères, mobilité contrainte). C'est comme ça qu'on provoque des mouvements tels que les gilets jaunes. Et pour le coup, c'est peut-être un jour l'Europe entière qui protestera contre des réglementations socialement inacceptables.
*La fameuse tolérance d'un facteur de 2,1, qui sera ensuite ramenée à 1,5 pour tenir compte du passage - pas si facile - de normes à respecter sur route ouverte en conditions réelles et non plus en laboratoire. Le niveau maximum autorisé d'émissions de NOx a été relevé provisoirement à 168 mg/km et fixé à terme à 120 mg/km, bien au-dessus des 80 mg/km initialement prévus par le Conseil et le Parlement européens dans le cadre de la norme « Euro 6 » adoptée en 2007.