mardi 26 mai 2020

Plan de relance automobile : des bornes et des bonus

En présence d'Elisabeth Borne et de Bruno Le Maire, Emmanuel Macron a donc présenté un plan de relance pour le secteur automobile doté d'une enveloppe de 8 milliards. Le Président a fait le choix de le faire depuis une usine de Valeo située à Etaples, près du Touquet (Pas-de-Calais). C'est un site qui fabrique des composants pour la micro-hybridation 48 volts. Un symbole destiné à donner la couleur de ce plan, qualifié d'historique et placé sous le signe de la transition énergétique. Alors, que retenir des annonces présidentielles ?

Le chef de l'Etat a rappelé que l'industrie automobile était confrontée à des défis, bien avant la crise du Covid-19. Il a évoqué le véhicule électrique et bien sûr le véhicule autonome, qu'il convient de préparer dès maintenant.

L'ambition est de produire 1 million de véhicules hybrides rechargeables et électriques d'ici 5 ans et de devenir ainsi la première nation (en Europe) dans les véhicules propres. Cette ambition reflète les contreparties demandées aux constructeurs. Renault et PSA ont en effet pris l'engagement de localiser en France les modèles à forte valeur ajoutée, dont les véhicules électrifiés. A ce propos, PSA a fait des annonces avec notamment la production de la 3008 électrique. Pour sa part, Renault va produire à Cléon le futur moteur électrique de l'alliance avec Nissan et Mitsubishi. Un moteur qui devait initialement se faire en Asie. Et il va tripler sa production de VE d'ici 2022 (elle sera quadruplée d'ici 2024). Précisons que la marque au losange a été "invitée" à rejoindre l'alliance pour les batteries, à laquelle PSA participe déjà et qui est essentiellement un projet franco-allemand.

Afin de soutenir la demande, les pouvoirs publics vont augmenter les aides à l'achat qui avaient été rabotés avant la crise du Covid-19. Ainsi, les bonus pour les véhicules électriques (dont ceux à hydrogène) sont portés à 7 000 € pour les particuliers et à 5 000 € pour les entreprises. Par ailleurs, une aide de 5 000 € sera accordée pour l'achat d'un véhicule électrique dans le cadre de la prime de conversion (qui sera accessible aux trois quarts des français). Elle sera valable dès le 1er juin pour les 200 000 premiers véhicules.

Il faut savoir qu'on dénombre 315 000 véhicules électriques en France, sur un parc de 40 millions de véhicules.

S'agissant de la recharge, l'Etat s'engage à tenir dès 2021 l'objectif de 100 000 bornes (seuil qui était prévu initialement en 2022 dans le cadre du contrat de filière auto). Le Président n'a rien dit sur les stations à hydrogène. Toutefois, il a évoqué la production d'une pile à combustible par Michelin dans une usine près de Lyon.

Le plan se tourne également vers l'usine du futur. Afin de préparer la numérisation et la robotisation, 200 millions seront investis. Par ailleurs, un fonds d'investissement sera doté de 600 millions (400 millions de la part de l'Etat, 200 millions apportés par Renault et PSA) pour venir en aide à la filière. Un soutien à l'innovation est également prévu, avec 150 millions dès 2021.

Emmanuel Macron semblait fier de ce plan, puisqu'il a déclaré que nul autre pays n'aide autant son industrie automobile.

Mon avis : la force du plan est de remonter les bonus (mais pour combien de temps ?) et d'ajouter (enfin) les hybrides rechargeables. Cette technologie est plus progressive et l'aide de 2 000 euros va apporter une bouffée d'oxygène pour les constructeurs français (surtout PSA à ce jour) qui ont investi dans ce domaine. C'est une victoire pour la PFA (et son président, Luc Chatel), qui avait exprimé plusieurs fois cette demande. L'autre bonne idée est d'agir sur l'infrastructure. Emmanuel Macron a donc décidé d'accélérer d'un an le calendrier (que je trouvais irréaliste, soit dit en passant) pour les bornes de recharge. On verra si la promesse sera tenue.

En conclusion, ce plan va amorcer la pompe en aidant les industriels à déstocker. Il facilite aussi l'achat de véhicules électrifiés, essentiels pour tenir les objectifs en CO2 de 2020 (ils ne sont pas remis en cause par l'Europe). En revanche, et cela a été souligné par BFM TV dans le débat qui a suivi les annonces, la production de composants électriques nécessitera moins de main d'œuvre et il y aura à terme une menace sur l'emploi.

Par ailleurs, le Président aurait pu donner un coup de pouce à l'hydrogène. Il n'a pas saisi cette occasion. C'est une faute, car l'Europe y croit et des géants asiatiques vont en profiter.

On sera peut-être un grand pays pour la production de véhicules électrifiés, mais pas des champions du monde….