mercredi 6 septembre 2023

IAA Mobility : un vrai salon de Tech

On ne va pas se mentir, les « bagnolards » seront déçus. Et les journalistes qui font le décompte mortifère de « Kikepala ? » non plus. En fait, pour voir un salon de l’auto comme à l’ancienne, il faut aller en Chine. Ou bien, il faut attendre d’aller à Lyon, fin septembre, où beaucoup de marques seront là, mais représentées par des concessionnaires. 

On peut toujours épiloguer sur l’absence de grands acteurs (Toyota) ou la participation à la portion congrue de grands groupes (Opel pour le seul groupe Stellantis), mais ils ont tort et il y aura toujours 10 Chinois pour prendre leur place. Une fois qu’on a énoncé ça, c’est comment l’IAA Mobility ? J’ai trouvé ça épatant.

Certes, j’aurais dû préciser avant que je ne viens pas sur un salon pour voir des parkings de véhicules. Déjà, à l’époque de l’IAA de Francfort, je trouvais que ce salon était très intéressant en matière de technologie. On y voyait beaucoup d’équipementiers (ceux qui innovent vraiment, pour le compte des constructeurs) et certains d’entre eux réservaient à l’IAA la primeur de leurs innovations. Ainsi, Valeo a souvent fait le show à Francfort, avant de se rendre au CES de Las Vegas. Sans surprise, Bosch, Continental et ZF sont au rendez-vous. Là, à Munich, j’ai pu à a fois voir de belles autos et des technos vraiment innovantes. C’était saucisse et bretzel. 

Oui, on a surtout vu de l’électrique. Mais, avec des sportives (ah, la Dark Rebel de Cupra, mais aussi la Porsche MissionX, la Mercedes Vision One Eleven, la MG Cyberster) et des modèles très prometteurs (Avatr 12). Oui, il y a beaucoup de marques chinoises (BYD, Hiphi, Seres, Xpeng…), dont les véhicules étaient à l’essai (j’ai été impressionné par la Xpeng P7). Mais, c’est logique vu que l’Empire du Milieu est depuis plus de 10 ans le premier marché automobile au monde et qu’il maîtrise toute la chaine de l’électrique. Le géant de la batterie, CATL, est d’ailleurs présent. 

Notez que l’hydrogène commence à pointer le bout de son nez, avec l’IX5 Hydrogen chez BMW. Il y a des messages subliminaux chez Bosch et Forvia qui laissent deviner que l’auto sera concernée par la pile à la combustible à la fin de la décennie. 

Moi, ce qui m’a marqué, c’est la présence de grands noms de la tech. Amazon est là, de même que Qualcomm, MobilEye, LG, Samsung, IBM. On peut y voir aussi des fabricants de lidars (Luminar, Microvision, Hesai, Valeo) et une foule d’acteurs qui ont des compétences dans le logiciel, la cyber sécurité et la connectivité. J’ai même aperçu la banque JP Morgan, venue présenter la sécurité des paiements à bord des véhicules. L’un des acteurs les plus prometteurs, ecarx (co-fondé par le patron de Geely) est sur l’IAA Mobilité. Il a une maîtrise complète, du logiciel au produit fini, grâce à des partenariats dans les puces. C’est un futur roi du cockpit. 

Pour la première fois, le groupe Zeiss (que l’on connaît à travers la photo) est venu montrer son savoir-faire en matière d’affichage holographique sur le pare-brise et les vitres. 

Quand on va sur le salon au MesseStadt West et même sur l’expo Open Space (plusieurs spots en centre-ville de Munich), on peut toucher le futur du doigt. Mercedes a sorti par exemple du garage son concept EQXX (1 000 km d’autonomie en électrique). Le DLR, l’équivalent un peu du CNES en France, expose sa vision de la voiture bas carbone. Que ce soit dans les composants de la chaîne de traction (batteries, piles à combustible, stockage de l’énergie), le cockpit intelligent, la connectivité, l’affichage (Avatr fait déjà défiler des messages en bas du pare-brise pour les piétons), on n’est pas si loin de ce qu’on peut trouver sur un show de référence comme le CES de Las Vegas.

Figurez-vous que Jean-Michel Jarre était présent, en tant que compositeur retenu par Renault pour assurer le son de ses véhicules électriques. J’ai pu faire son interview, c’était intéressant. Quand je pense que la même marque avait choisi David Guetta pour assurer la promo du Twizy, au salon de Genève, il y a plus de 10 ans…

Du côté des conférences, car il y en a, le programme est assez bien fichu. J’ai écouté William Sho, le patron de LG. J’ai vu aussi l’actrice Natalie Portman (la princesse Amidala de Star Wars et l’égérie de Dior) quand elle est venue parler de développement durable. En tant que journaliste, j’ai pu voir tout cela à la fois : la partie expo, les open spaces et même le discours du chancelier allemand Olaf Scholz. Et toute la semaine, il y a des interventions sur la technologie.

Le choix de faire un salon hybride est audacieux. Mais, c’est une démarche que je trouve pertinente. Et encore une fois, l’édition 2023 reflète bien les tendances du moment avec une industrie chinoise qui va très vite sur l’innovation et des européens se retroussant les manches. La présentation par BMW de sa plateforme Neue Klasse et de son boîtier Heart of Joy (tuning digital pour l’électrique) va dans le bon sens. Un mot sur Tesla. Pour son grand retour après 10 ans d’absence d’un salon allemand, la marque a fait le minimum syndical : deux véhicules exposés au salon et la Model 3 restylée présentée sur la Konigsplatz. Et ce n’est pas chez eux que j’y ai vu le plus de monde. Comme quoi, les fans de la marque (dont de nombreux journalistes) vivent dans un autre monde.