jeudi 19 décembre 2019

Lost in electrification

"Le décollage du véhicule électrique est compromis". Telle est la réaction de Luc Chatel, le Président de la PFA (Plateforme de la Filière Automobile), suite à l'annonce de la baisse du montant du bonus écologique pour l'achat d'un véhicule électrique. Il sera en effet revu à la baisse en 2021 et 2022, en passant de 6 000 à 5 000, puis à 4 000 euros.

Les constructeurs ne comprennent pas la cohérence des choix gouvernementaux qui, d'un côté frappent sévèrement au portefeuille les véhicules thermiques, et de l'autre ne consacre pas les moyens qu'il faudrait pour soutenir la transition vers l'électrique (sans parler de l'équipement en bornes de recharge, comme cela est prévu dans le contrat de filière pour 2022).

Le ministère de la Transition écologique et solidaire justifie cette décision par la prise en compte de la baisse des prix de ce type de véhicules. Une baisse qui sera "accélérée par les nouvelles normes européennes sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre". Concrètement, selon l'AFP, le gouvernement a décidé de maintenir l'enveloppe budgétaire du bonus en 2021 (400 millions d'euros) pour soutenir plus de 130 000 véhicules. Pour l'année 2022, elle passera à environ 340 millions d'euros pour soutenir plus de 160 000 véhicules.

Le ministère rappelle au passage que près de 40 000 véhicules électriques ont bénéficié du bonus en 2018 et 50 000 en 2019.

Le tour de vis va commencer en fait dès 2020. Ainsi, les véhicules dont le prix est compris entre 45 000 et 60 000 euros se verront en effet attribuer un bonus réduit, à 3 000 euros, afin d'éviter "les effets d'aubaine". Et au-delà d'un prix de 60 000 euros, les véhicules ne seront plus éligibles au bonus, à l'exception des véhicules utilitaires légers et des véhicules à hydrogène. Voilà pour le coup de pied de l'âne vers Tesla, Audi, Mercedes, Jaguar et Porsche.

Le gouvernement a également décidé de distinguer les personnes physiques et morales dans l'attribution du dispositif "en raison des avantages fiscaux à destination des véhicules électriques dont disposent les entreprises". Ces dernières "sont en effet exonérées de taxe sur les véhicules de société pour les véhicules électriques possédés", précise le ministère. Le bonus sera ramené à 3 000 euros pour les personnes morales en 2020, à 2 000 euros en 2021 puis à 1 000 euros en 2022.

Tout cela fera l'oeuvre d'un décret avant la fin de l'année. Les constructeurs*, qui réclamaient une visibilité pluriannuelle sur le bonus, ne sont pas vraiment enchantés par ces annonces. Luc Chatel parle d'une double peine. Pour lui, "le grand risque est que tout le monde soit perdant : l’industrie, l’écologie et le pouvoir d’achat des Français".

*Ils ont investi massivement avec 100 modèles de véhicules électriques disponibles en 2019, 176 en 2020, 214 en 2021, 333 en 2025.