vendredi 15 juin 2018

Volkswagen et l'automatisation : une expertise méconnue

Le point d'orgue de mon périple en Allemagne cette semaine était un passage au centre de test d'Ehra, un complexe en pleine forêt dans la région de Hanovre. C'est là que Volkswagen développe et teste ses futurs véhicules. Pour notre venue, qui avait été précédée par celle des dirigeants du groupe et des chercheurs en interne, nous avons eu droit à une sélection de projets autour du véhicule autonome, du Big Data et de l'électrification. Mais, avant de parler du clou de la visite, qui était l'essai de la navette SEDRIC, parlons un peu de l'engagement du groupe VW dans l'automatisation.



Peu de gens le savent, mais VW a remporté le DARPA Challenge avec un Touareg autonome baptisé Stanley. Le véhicule avait été développé en interne par l'ERL (Electronics Research Lab, qui existe depuis 1998 dans la Silicon Valley), en collaboration avec l'université de Stanford. L'un des étudiants était Sébastien Thrust, qui démarrera plus tard le projet de voiture autonome chez Google. On en a parlé hier, car le responsable de la recherche pour le groupe VW, Axel Heinrich, nous a confié qu'il aurait fallu poursuivre l'effort à l'époque.

Tout en ayant des compétences dans le domaine de la conduite autonome, VW estime aujourd'hui que Waymo et Ford sont les compétiteurs les plus en pointe.


Hier, on a roulé dans une e-Golf équipées de 5 lidars. La démo consistait à montrer comment on peut anticiper des collisions avec les piétons. En se basant sur une caméra standard, un piéton qui déboucherait d'entre deux voitures pour traverser la rue ne serait détecté qu'au dernier moment.


En revanche, en utilisant une carte dynamique de chaleur, qui sait isoler les objets fixes et les personnes, la voiture peut ralentir plus tôt.


J'ai bien aimé aussi l'approche menée sur un Tiguan, qui avait été recouvert de panneaux animés extérieurs. Volkswagen pense que le véhicule autonome doit pouvoir se faire comprendre des piétons et des autres usagers. Par exemple, l'écran de devant peut afficher un piéton qui marche, pour signifier que le véhicule vous a vu et qu'il est possible de traverser. Sur le côté, les écrans peuvent indiquer que le véhicule va tourner, avec en prime un signal lumineux projeté au niveau du sol et qui est le prolongement du clignotant. L'écran de derrière peut afficher un éventuel danger pour les véhicules qui suivent, voire un message pour signaler une panne.


Je voudrais également mentionner l'étude menée sur le mal des transports. Le test consistait à confier une tablette (pour y regarder une vidéo) et à mesurer ensuite les éventuels signes de malaise qui peuvent naître d'une autre occupation pendant une phase de conduite autonome. Avec une caméra, on surveille ainsi si vous devenez pâle, alors qu'un autre capteur sur le siège détecte si vous transpirez.


Comme je le disais donc en introduction, le point fort de notre visite était la petite balade en navette autonome, la fameuse Self Driving Car. L'essai a été court, mais concluant. A partir de son smartphone et de l'application idoine (SEDRIC), une personne a appelé la navette. Celle-ci a parcouru quelques dizaines de mètres pour venir à notre rencontre, en émettant un peu de musique. On voit ensuite s'afficher le mot "hello" sur les portes. Le signe que l'on peut rentrer.


Une fois la ceinture bouclée, et quand l'un des passagers a appuyé sur le bouton "Go", le véhicule avance sans chauffeur. SEDRIC a fait un petit tour, en empruntant un itinéraire délimité par des cônes sur une aire plane.


Pendant ces quelques minutes, à une vitesse de 25 km/h et avec un certain confort de roulage, nous avons pu profiter de la grande surface d'affichage que propose le pare-brise. Il est possible d'y projeter des informations et des vidéos.


SEDRIC préfigure un futur service de transport à la demande en mode autonome. La promesse de Volkswagen est de rendre le voyage facile, d'un simple clic sur le smartphone pour commande la navette, et en appuyant sur un bouton pour la mettre en route.


 Avant de se quitter, une petite anecdote. J'étais déjà venu sur ce site d'essai il y a plus d'une dizaine d'années, quand je travaillais encore pour M6 Turbo. Et à l'époque, j'avais pris place à bord d'une Golf automatisée qui servait pour du développement de châssis. Assis à la place du conducteur, je ne touchais ni le volant, ni les pédales. Et pourtant, l'auto alignait les chronos pour faire des slaloms, sans jamais toucher un cône et en braquant et en rétrogradant comme aurait pu le faire un pilote. Oui, VW est sans doute resté trop modeste à une époque où ni Uber, ni Tesla ne savaient faire tout cela.