Hier soir, environ 200 personnes ont assisté aux voeux de la filière automobile, à l'invitation de la PFA, du CCFA et de la FIEV. Une cérémonie organisée à l'Automobile Club de France. C'était l'occasion de voir et surtout d'entendre Luc Chatel qui, comme je l'ai déjà écrit ici, est donc le nouveau Président de la Plateforme de la Filière Automobile & Mobilités. C'est la structure qui permet d'unifier la filière (chacune des fédérations gardant son identité propre) et de parler d'une seule voix sur les grands sujets qui touchent l'automobile. C'est un Luc Chatel très volontaire qui a démarré cette séance de voeux.
L'assistance a découvert ainsi que le Président de la PFA s'était rendu au CES de Las Vegas. Cela lui a permis de prendre la mesure de l'évolution rapide des technologies. L'électrification, le numérique et le sociétal sont les trois grands changements. Il a ensuite évoqué les politiques, en affirmant que quand les maires des 40 plus grandes villes du monde interpellent l'industrie automobile, il faut les écouter et les respecter. Néanmoins, a-t-il estimé, ce sont aux industriels d'apporter une réponse technologique. Il s'est félicité du rachat d'Opel ("un français qui rachète un allemand, ça fait du bien") et a rappelé que Tesla ne représente que 0,1 % du marché mondial.
Puis, il sorti une formule mémorable : 4 = 3. L'ancien ministre de l'Education Nationale a ensuite expliqué pourquoi. 3 : les principales tendances. 4 : le nombre de défis.
Le premier défi est celui de la recherche collaborative. Il faut coopérer davantage, a souligné Luc Chatel, qui entend faire de ce thème un des axes forts du futur contrat de filière qui sera signé avec l'Etat. Il a salué à ce propos les travaux du CTA (Comité Technique Automobile), qui au sein de la PFA, guide les travaux de R&D à travers les programmes sur le véhicule autonome et le véhicule connecté.
Le deuxième défi est celui de la compétitivité de la filière. Il faut aider les PME pour élever leur niveau, en prenant exemple sur ce qui a été fait dans l'aéronautique.
Le troisième défi est celui de l'humain. Comment pérenniser les emplois et attirer les talents de demain, s'est demandé Luc Chatel. Il a évoqué un chiffre qui devrait faire réfléchir ceux qui pensent que les usines peuvent facilement se convertir : il faut en moyenne 7 ouvriers pour faire un moteur Diesel, contre 1 seul pour un moteur électrique. Le Président de la PFA propose donc d'analyser à froid les impacts en matière d'emploi et de formation. Il a évoqué le cas des chauffeurs de VTC, généralement sans formation, et qui seront fragilisés quand ces véhicules seront sans conducteur.
Le quatrième défi est donc celui du collectif. Il faut s'ouvrir vers les acteurs de la mobilité, tout en mettant en commun les ressources et se serrant les coudes. Luc Chatel a invité à rejoindre l'Equipe de France qui se met en place. Il a rappelé au passage que l'Etat avait sauvé deux fois l'industrie automobile, dont une fois à l'époque où François Fillon* était Premier Ministre.
Présents à ses côtés pendant le discours, Christian Peugeot et Jacques Mauge ont ensuite pris la parole.
Le Président du CCFA a regretté la chute trop rapide du Diesel, à un moment où cette technologie est maîtrisée. Il a par ailleurs fait une proposition intéressante : consacrer une partie des 40 milliards de taxes que rapportent à l'Etat l'automobile et la route, pour financer des bornes de recharge. Car, selon lui, les pouvoirs publics doivent aussi investir s'ils veulent que les français passent à l'électromobilité. Christian Peugeot a également évoqué le véhicule connecté, en expliquant que le constructeur était à la fois un compositeur et le chef d'orchestre. Il a plaidé pour une concertation avec les acteurs de l'automobile, en ce qui concerne les données, en soulignant l'importance de préserver la propriété des données privées.
Et puis, il a eu cette phrase magnifique. En faisant référence au bétonnage des voies sur berge, pour faire obstruction au trafic automobile, il a évoqué le "mur de Berlin" et "un soviétisme oublié".
Puis, ce fut le tour de Jacques Mauge pour la FIEV. Il était également à Las Vegas (en tant que cadre de Faurecia) et a évoqué le CES en trois points : les 7 écrans (du tableau de bord à la montre connectée), la santé et la smart city. Il a également souligné l'agilité des équipementiers, bien placés pour relever les défis, même si on parle toujours des nouveaux entrants. Il s'est félicité aussi du succès d'Equip Auto.
En 2018, l'événement sera le Mondial de l'Automobile, avec une partie Mondial.Tech. Cet événement B to B consacré aux nouvelles mobilités et aux start-up sera d'ailleurs organisé tous les ans, et alternera entre le Mondial et Equip Auto.
*L'ancien candidat à la Présidentielle était présent hier, au début des voeux. Il est venu en voisin, puisqu'il a été nommé récemment par Jean Todt Président de la Commission Constructeurs de la FIA pour la renégociation des nouveaux Accords Concorde qui devront régir la Formule 1 à compter de la saison 2021.