A l'approche de la COP21, que la France rêve de transformer en succès planétaire, rien n'est trop beau pour verdir l'action du gouvernement. Et ce souci de bien faire ou d'aider François Hollande se traduit par une avalanche d'annonces qui me font hésiter entre le fou rire et la consternation. Prenons l'exemple des dernières déclarations de Ségolène Royal. Notre ministre de l'Ecologie a déclaré sur i-Télé vouloir élargir le bonus de 10 000 euros pour les véhicules électriques.
Désormais, les propriétaires d’un véhicule diesel de plus de dix ans pourront bénéficier de cette prime s'ils le mettent à la casse, alors qu'avant ce dispositif ne concernait que les véhicules antérieurs à 2001. Ségo espère ainsi doper les ventes de véhicules électriques qui plafonnent "royalement" à 1 % des ventes de voitures neuves.
Le CCFA estime à environ 5,8 millions le nombre de véhicules diesel âgés de plus de dix ans, soit moins de 30 % du parc diesel français. Il s’agit de véhicules à la norme Euro 3, précise la chambre syndicale des constructeurs français. Je reviendrai un peu plus loin sur le diesel. Les médias ont relayé cette annonce du bonus élargi. Par contre, ils n'ont pas relevé une intéressante information, publiée par Le Figaro. Selon le quotidien, le bonus pour les hybrides va diminuer à partir du 1er janvier 2016. Il passera de 2 000 à 750 euros pour les hybrides et chutera à 1 000 euros au lieu de 4 000 euros pour les hybrides rechargeables. Il se trouve que les constructeurs français ne sont pas très compétitifs sur ces marchés, et même carrément absents sur le plug in qui est pourtant la solution de transition la plus intelligente.
Donc, en résumé, on fait de la com' et on masque le fait que les finances publiques ne peuvent plus financer le bonus. Et si a priori le bonus de 6 300 euros va se maintenir pour la voiture électrique, il y aura forcément un moment où ça va s'arrêter. Et là, on verra si les ventes vont continuer d'augmenter.
Notre ministre de l'Ecologie a déclaré aussi que l'avenir c'était la voiture électrique et qu'elle souhaitait voir les constructeurs français en pointe sur ce marché. On peut toujours rêver. En tout cas, les acteurs qui y ont cru en Poitou-Charentes dont Mia et Eco & Mobilité ne sont plus là pour en parler. D'ailleurs, il y a comme une odeur de réchauffé, car sur i-Télé l'ancienne présidente de cette région a annoncé le lancement d'un programme de recherche sur un véhicule électrique abordable entre 5 000 et 8 000 €. C'est ce qui avait déjà été fait en 2008 par la région (projet VELECT*), avec le succès que l'on sait.
Par contre, Ségolène Royal s'intéresse à l'hydrogène. Et sur ce coup là, elle fait preuve de clairvoyance. C'est en partie grâce à elle qu'une filière va pouvoir voir le jour.
Mais, revenons au diesel. Car, là aussi, des déclarations intempestives viennent "polluer le débat". A force de dire qu'il faudra sortir du diesel (ce qui est un pur mensonge, car les camions et les bus ne sont pas près de rouler à l'électrique, à la rigueur au gaz naturel si des pompes existaient), et qu'il faut taxer davantage le gazole (personnellement je n'ai rien contre), voire l'interdire, on ne réussit qu'à semer le trouble chez les français qui se reportent sur l'essence. Le niveau actuel de 59 % (en moyenne) du mix est sans doute celui qui n'aurait jamais dû être dépassé**, mais il va probablement continuer de baisser. Et cela va affecter en premier lieu les constructeurs français.
Je suis d'ailleurs assez consterné de voir à quel point les médias font l'amalgame entre le scandale Volkswagen et le risque sanitaire lié au diesel, en englobant dans le même sac tous les constructeurs. Heureusement qu'on n'a pas retrouvé de trace de viande de cheval dans les steaks hachés de la cantoche de VW, sinon on aurait dit aussi que c'était de leur faute.
Bref, vous l'avez compris, les politiques parlent trop. Et en général de ce qu'ils ne connaissent pas. Encore deux mois à tenir comme ça, jusqu'à la COP21.
*Trois entreprises ont répondu à l'appel à projets et ont présenté au Mondial de l'Automobile en novembre 2008 des prototypes de véhicules électriques. La Région était intervenue à hauteur d'environ 1,5 million d'euros.
**Merci au bonus écologique qui a dopé la demande en diesel, en accordant des bonus à des véhicules qui n'avaient même pas de filtres à particules.