mercredi 30 avril 2014

Le diesel du futur se prépare au Luxembourg

Je reviens du Luxembourg, où je suis allé visiter le centre de recherche sur le diesel* de Delphi. L’équipementier américain m’accueillait pour deux raisons : d’une part parce que nous devions préparer un congrès international**, mais aussi parce que ça m’intéressait de voir les installations qui, pour certaines, sont assez uniques. Ca va sans doute en chagriner certains, mais le diesel n’est absolument pas remis en cause dans l’industrie automobile. Il a même de belles marges de progression, avec un gain de 20 à 30 % en CO2 escompté d’ici 2020.



Un mot d’abord sur le site, qui se trouve à Bascharage, en pleine campagne à une vingtaine de mn de la ville de Luxembourg. Il est idéalement situé, près de la France et de l’Allemagne. C’est un peu la Suisse du nord de l’Europe. On y croise des ingénieurs français, allemands, belges et de plein d’autres nationalités. Ce centre de recherches regroupe, au sein du Customer Technology Center, qui accueille aussi le siège de Delphi Europe, toutes les compétences nécessaires au développement des moteurs diesel.


Alors que des questions se posent sur le surcoût lié au passage de la norme Euro 6 et de la dépollution, l’équipementier américain n’est pas inquiet sur l’avenir de cette motorisation. Il faut dire que Delphi a, historiquement, une grande expertise dans le domaine de l’injection diesel. Ce qui lui vaut d’ailleurs une avance technologique (comme avec le Direct Acting, qui consiste à piloter directement l’aiguille de l’injecteur).


Les tendances pour l’avenir ? Encore et toujours l’injection common rail, avec plus de pression (2500 bars contre 2000 aujourd’hui) et surtout une plus grande précision dans le dosage du carburant. Delphi se focalise sur la combustion avec l’admission digitale.


Grâce à l’électronique, l’idée est d’arriver à une « répétabilité » des injections. Séquencées toutes les 300 millisecondes (puis à terme, 200, puis 100 millisecondes) et multiples (le but est d’arriver à 9, dont 2 pour les post injections), les injections seront demain d’une précision atomique et gérées par des calculateurs utilisant les mêmes puces que dans les ordinateurs.


J’ai pu voir des moyens d’analyse et de mesure assez étonnants, dont une caméra qui enregistre un million d’images à la seconde pour étudier en détail la combustion.


Au-delà d’une plus grande maîtrise de l’injection, il y a aussi une approche autour de l’électrification (smart alternateur, hybridation pour les gros véhicules), de la réduction des frottements et du rendement. Ces technologies de pointe intéressent les constructeurs les plus prestigieux, mais aussi les chinois et les indiens, qui veulent le dernier cri et comptent s’en servir pour aborder les marchés de l’ouest.


Une autre tendance est la transparence. En limitant le bruit et les vibrations, les chercheurs veulent faire oublier le diesel et faire en sorte que le conducteur et ses passagers ne se rendent même pas compte que le moteur est en marche.


Ce qui est intéressant, c’est que les équipes en charge du diesel et de l’essence y travaillent ensemble. C’est ainsi que l’expertise acquise à travers le common rail a pu profiter à l’essence, avec un système d’injection à trous qui intéresse plusieurs constructeurs.


A terme, on pourrait très bien avoir un rapprochement entre le diesel et l’essence. La piste du moteur unique, associant le meilleur des deux univers, a été explorée par Delphi à travers un projet impliquant Hyundai et financé à 50 % par le gouvernement américain. C’est le moteur GDCI (Gasoline direct Injection Compression Ignition), d’une cylindrée d’1,8 L et comparable en conso à un 2 L diesel, qui a été présenté à bord d’une Sonata au dernier congrès de la SAE à Detroit. On y songe également en Europe.

*Advanced Diesel Injection and Combustion Center
**Le congrès Diesel à Rouen qui a lieu dans quelques semaines : http://www.sia.fr/evenement_detail_sia_powertrain_rouen_2014_1200.htm