Le scandale Volkswagen a pris une ampleur que personne n'aurait pu soupçonner. Et ce n'est peut-être pas fini. Comme d'autres experts, j'ai été amené à commenter ce cas de triche complètement improbable sur les radios (France Info, RTL, RTS en Suisse, BFM Business, France Bleu, Europe 1) et en presse écrite (AFP, Sud Ouest). Si j'en parle maintenant, et seulement maintenant sur ce blog, c'est parce que je suis lassé des amalgames que l'on peut faire entre un groupe automobile qui a choisi délibérément de frauder et le reste de l'industrie. Et surtout consterné de voir que la polémique tourne finalement autour du diesel sur le mode "je vous l'avais bien dit", "on nous ment" et le "diesel propre" n'existe pas. En aurait-on fait autant si la fraude de VW avait porté sur des moteurs à essence ?
Dès l'annonce du scandale Volkswagen, les Verts - avec leur sens de la finesse - ont réclamé la sortie du diesel, avec 2025 comme date-butoir. Le parti EELV-Les Verts, qui commente au quotidien à peu près n'importe quel sujet de l'actualité, est-il audible et crédible pour réclamer cela ? Quelle est la légitimité de ce parti politique qui s'est décrédibilisé dans son action et qui a été désavoué dans les urnes ? On pourrait en dire autant de la plupart des médias grand public qui, faute de gens compétents dans leurs rangs, ou tout simplement parce que ce sont avant tout des parisiens pour qui l'automobile est un drôle d'engin quelque peu inutile, et qui ne détestent pas relayer les souhaits des amis de Mme Hidalgo, sont ravis de "taper" sur l'industrie française.
C'est même du pain bénit pour Elise Lucet et son émission Cash Investigation. La journaliste de France 2, qui semble en faire une affaire personnelle, a décidé de rediffuser le long numéro sur le diesel qui s'était attaché à accréditer la thèse que les constructeurs ne fournissent pas les bonnes données sur les polluants, en cherchant à piéger au passage PSA qui avait été le seul à accepter de parler. Ce numéro, qui n'avait pas été succès d'audience autant que je me rappelle, avait eu pour seul mérite de faire connaître le défapage. Une pratique condamnable par la loi désormais.
Alors, qu'est-ce qui va changer ? Les constructeurs automobiles, que les médias pressent de changer de stratégie, vont-ils abandonner le diesel ? La réponse est clairement non. En dépit de Cash Investigation et des incantations de ceux qui n'y connaissent rien, le diesel "propre" (filtré au niveau des particules et doté d'un système limitant les oxydes d'azote) reste incontournable pour passer le cap des 95 g de CO2 en 2021. C'est pour cela que Renault, que certains blogueurs prennent pour le chevalier blanc de l'électrique, va lancer une Mégane avec un système d'hybridation légère couplé au diesel en 2017. Aucun constructeur n'a prévu de renoncer au diesel. Parce qu'il n' y a pas d'alternative, en particulier pour les gros véhicules de type berline, monospace ou SUV.
L'essence ? Elle est encouragée et les automobilistes y retournent progressivement. Certains moteurs rejettent pourtant 10 fois plus de particules que le diesel moderne, sans que cela n'intéresse les détracteurs du diesel. Et les véhicules consomment bien plus. L'électrique ? Malgré le soutien inconditionnel de Ségolène Royal, les clients n'en veulent pas et le marché reste confidentiel. Une solution pourrait venir de l'hybride rechargeable, couplé à l'essence ou au diesel, et dont... le groupe Volkswagen est justement un champion (les français ne seront prêts que d'ici 3 ou 4 ans). L'hydrogène ? Un jour, quand les européens se décideront à suivre Toyota.
Le fond de l'histoire, c'est que les consommateurs recherchent avant tout un prix et si possible une voiture qui apporte de l'agrément. Une voiture "propre" bride la performance (et c'est sans doute cela qui explique la triche de VW, pour faire plaisir à ses clients) et n'intéresse guère le consommateur, à moins d'être un militant convaincu.
Finalement, cette affaire risque d'accélérer des évolutions qui étaient déjà les tuyaux. A savoir, le nouveau cycle WLTP (plus réaliste que le NEDC) et la mesure d'émissions sur route (RDE : Real Driving Emissions). Tout cela était déjà planifié pour 2017. Mais, le scandale Volkswagen n'a fait qu'accréditer l'importance de ce changement. Et pas seulement sur le diesel.