Alors que la France compte officiellement 14 000 points de charge, on a appris cette semaine que le groupe Bolloré était candidat pour déployer 16 000 points de charge publics. Un chantier d'envergure qu'il se propose de réaliser d'ici 2018 et pour un investissement de 150 millions d'euros. Le dossier a été envoyé à Bercy, qui se félicite de voir "de l'argent privé" venir en aide de l'Etat, qui persévère dans sa vision d'une France convertie à l'électrique et qui éblouirait le monde entier. Le réseau déployé par Bolloré facilitera sans doute la diffusion de ces véhicules, avec un maximum de 50 km entre chaque borne, mais ne répond pas forcément à la demande.
Pour son réseau national, qui fera l'objet d'une concertation avec les régions concernées, le groupe de l'industriel breton a fait le choix de bornes d’une puissance de 7,4 kilowattheures. Des bornes de charge "semi-accélérée". C’est mieux que les bornes classiques dites de charge lente (dont les 4400 bornes d'Autolib') qui nécessitent 8 heures, mais il faudra patienter pendant au moins 3 à 4 heures pour refaire le plein. Ce n'est pas aussi pratique que les bornes de charge accélérée (22 kW pour recharger la Zoé en 1 heure) ou les bornes rapides (50 kW) comme celles déployées par Nissan et qui refont 80 % du plein en 30 mn. Le cas de Tesla est à part, avec des super chargeurs à 120 kW qui permettent de récupérer 50 % de la charge en 20 mn.
Le fait est que c'est la charge rapide qui intéresse les automobilistes qui veulent faire des longues distances. Chez Bolloré, on objecte qu'on peut retrouver 40 km d’autonomie en une heure. Oui, mais si la borne est libre ! Va-t-on assister à des embouteillages autour des points de charge ?
L'autre question qui se pose est celle du modèle économique. Car ce ne sera pas gratuit. On peut faire confiance à Bolloré, qui dispose des compétences nécessaires avec ses filiales pour gérer l'ensemble du système. Le point fort est que le réseau fonctionnera a priori avec une même carte et de façon unifiée. Le paiement permettra au groupe de rentabiliser son investissement et de proposer au passage des prestations d'autopartage, ce qu'il fait déjà avec des dérivés d'Autolib' à Lyon et Bordeaux et Utilib' pour les pros à Paris.
En parallèle, d'autres bornes vont être installées. La Commission a donné son feu vert au projet Corridor, porté par Renault, et qui regroupe autour du constructeur français son allié Nissan, BMW, Volkswagen et EDF. A partir de janvier 2015, 200 bornes de recharge rapide (une demi-heure pour une recharge complète), seront déployées sur des aires d’autoroute françaises, pour l’essentiel au niveau des frontières avec l’Allemagne, la Belgique, ou encore l’Italie. Le montant des investissements est de 10 millions d’euros, dont 4,5 financés par Bruxelles.
Et encore, on ne vous a pas parlé de Colas, qui pourrait installer jusqu'à 1 000 bornes.
Tout cela est très bien pour l'Etat, qui veut atteindre l'objectif de 7 millions de points de charge en 2030, comme cela est écrit dans la loi sur la transition énergétique. Tous les projets de dimension nationale seront validés au cours des prochains mois. On assure à Bercy qu'ils sont "complémentaires" de ceux des collectivités locales, soutenus par le programme d'investissements d'avenir.
Reste à voir si les bornes magiques seront compatibles avec les différents standards en vigueur, sachant que l'Europe a tranché en faveur de la prise de type 3 pour la charge lente et la norme Combo pour la recharge rapide.