samedi 20 février 2010

Une étude remet en cause les certitudes autour de la voiture électrique


Une fois n'est pas coutume, je vais vous parler d'une étude réalisée par des étudiants de l'ESCP Europe. Il s'agit de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris, qui prépare notamment à un Master "European Business". L'étude a été réalisée sur décembre et janvier sur le thème : "les véhicules électriques ont-ils un marché ?". Il se trouve que je fais partie des 754 personnes qui ont donné leur avis et qui ont répondu à un questionnaire assez fouillé. C'est par une diffusion sur quelques sites spécialisés et sur Facebook que les personnes ont été recrutées.


L'étude a été préparée pour le compte de Cap Gemini, une firme de consulting bien connue et qui opère dans le domaine de la technologie. Si cela vous intéresse, je vous invite à cliquer sur ce lien : http://sites.google.com/site/lesnouvellesvoitures/home/les-resul.


Alors, qu'apprend-on dans cette étude ? A mille lieues des études un peu dirigées ou des prévisions au doigt mouillé que l'on a l'habitude de lire, la méthode a au moins le mérite du bon sens. Les étudiants ont interrogé les participants sur l'adéquation entre la demande et l'offre et ont essayé de dresser le profil des acheteurs potentiels.



Sur le premier point, on apprend que 91 % de l'échantillon parcourt moins de 100 km par jour, que la moitié a déjà une citadine et que la moitié aussi ne prend jamais les transports en commun. Le prix et l'autonomie sont les facteurs les plus importants. Et là, la grosse surprise, c'est que l'autonomie souhaitée est de 232 km en moyenne. Autant dire que c'est bien plus que ce que promettent les constructeurs (130 à 160 km pour les batteries lithium-ion, 250 km pour Bolloré qui a une technologie différente). S'agissant du prix, un quart ne paiera plus cher et 9 % demandent même à payer moins. Apparemment, les clients potentiels demandent à ce que la voiture électrique soit au même prix qu'une version thermique.



S'agissant de l'offre, inexistante, les sondés ont été amenés à s'exprimer sur la Blue Car de Bolloré et sur la Renault Zoé. La première devrait sortir d'ici quelques mois, mais les personnes interrogées ont une mauvaise image de l'entreprise Bolloré et ont l'impression que le projet n'avance pas. Elle est toutefois considérée comme la meilleure. Quant à la Zoé, annoncée pour 2012, elle fait trop futuriste et n'est ni une citadine, ni une routière. Les soi disant experts en marketing apprécieront...



Les personnes interrogées ont été soumises à un panel de 10 véhicules : Bolloré Bluecar, Heuliez Friendly, Mitsubishi i-MIEV, Mini E, Nissan Leaf, Peugeot iOn, Renault Zoé, Renault Twizy, Smart ED et Tesla roadster. Quand on fait la synthèse des résultats, on se rend compte que ce sont les modèles à grande autonomie et à faible temps de charge (4 h est la durée moyenne souhaitée), ce sont en fait des voitures atypiques qui se distinguent. Pour l'ESCP Europe, il n'y a pas photo, le podium idéal est :
1) Bolloré Bluecar
2) Mini E
3) Heuliez Friendly
Ce classement est toutefois à relativiser, car il n'est pas sûr que les modèles en question sortent vraiment un jour. Bolloré sera plus un producteur de batteries qu'un constructeur. BMW prévoit en fait une auto électrique en 2013 (projet Mégacity) qui n'aura sans doute rien à voir avec la Mini. Quant à Heuliez, c'est la survie même de l'entreprise qui est en jeu.



En fait, l'enseignement principal est que la clientèle potentielle n'est pas plus "green" que cela, habite aussi bien ville qu'à la campagne, et que la recharge se fera surtout chez soi et à la campagne. Voilà qui tempère un peu les ambitieux projets de recharge rapide et de stations "quick drop" pour les batteries. La mobilité alternative façon "Autolib" à Paris ne suscite pas non plus beaucoup d'enthousiasme (même si moi je considère que c'est très bien pour éduquer le marché). Les constructeurs devront également présenter la voiture électrique comme étant plus fun et porteuse d'innovations (notamment avec un GPS connecté).
Autant dire qu'il y a encore du pain sur la planche et que ce n'est pas le marketing viral à la Facebook qui va régler le problème.